Le Jeu

« – Moi je fais Prue, toi tu fais Piper et l’une de vous fait Phoebe !

– Moi je fais Phoebe !

– Alors moi je fais qui ?

– Tu fais le corps astral !

– Okkkk ».

C’est marrant comme la seule vision de ces restes de poster me ramène à cette époque. Ce qui est surtout marrant, c’est comme cette époque semble si proche.

Samedi après-midi, j’ai rejoins le domicile familial pour quelques heures. Juste le temps de laisser ma mère me resservir en m’expliquant que je travaille trop et que je ne mange pas assez (nonobstant le fait que je lui explique que mes problèmes sont exactement inverses) et de regarder mes petites cousines se battre pour l’usufruit d’une Barbie sans tête.

J’ai besoin de souffler. Du coup, j’ai poussé la porte du placard. Je ne sais plus à quand remonte la construction de cette cachette. Je suis certaine qu’elle est antérieure à Harry Potter mais je me soupçonne d’en avoir tiré l’idée d’un livre. Peut-être un « j’aime lire ».

C’est bizarre un enfant. Même avec une maison, une chambre dans la maison, ça ressent le besoin de se faire une cabane dans le placard de sa chambre à la maison. Trois fois rien suffisent. Un poster et un tabouret, le tour est joué. C’est bête un enfant, dit-elle depuis le Placard.

Alors que j’observe les soeurs Halliwell vêtues de pulls à col roulé mais ne couvrant pas le nombril, je me souviens. Du jeu.

« On joue à quoi ? »

Point de départ de tant de rires, de bobos, de ragots, de souvenirs. On arrêtait le temps en levant le pouce le temps d’aller siffler un candy up et d’échanger un BN contre un Petit Prince et c’était reparti. On troquait des billes contre des calots ou des boulards, on se lançait des ballons à la gueule, on sautait par dessus des cordes et on était contents.

Quand on a « grandi », on jouait moins avec les garçons, mais entre nous, c’était l’époque bénite où on reproduisait les scènes de bagarre de Buffy ou de Charmed.

On était presque sures d’avoir des super pouvoirs.

Et aujourd’hui ?

Mes amis

Avec les Potes, on joue plus comme avant. Trop grands pour ça.

Parfois on essaye, s’il y a une bouteille d’alcool et un jeu de cartes. Parce que sinon on joue pourquoi ?

Ca ne veut pas dire qu’on ne rit pas! On adore ça. On raconte des histoires, on allume une cigarette, on jure que c’est comme ça que ça s’est passé et on rit aux éclats.

On joue comme des grands.

Mes amours

Mon amour. Je pense que c’est aussi un peu toi qui m’a enlevé le goût du jeu.

« Arrête de jouer avec moi ».

Point de départ de tant de souffrances. Cette phrase, combien de fois ai-je brûlé de te la dire ?

Mon amour. Sais-tu seulement comme le singulier rassure.

Car mon amour est autant d’amours qu’il m’a fait mal de ne pas aimer.

Parce qu’on jouait, emportés dans un jeu d’aucun ne saurait dire les règles.

La Manche

Les dés sont lancés.

Une seule règle : ne rien attendre.

Je n’ai rien attendu, il a pas supporté perdre. Du coup il a changé la règle et là, le premier à faire pleurer l’autre aurait gagné.

Il a gagné, même si je voulais plus jouer.

La Revanche

Je pensais avoir compris !

Ce qui manquait c’était de parler. Poser les cartes et dire les choses, ne pas tomber dans le piège du « il comprendra car c’est evident ».

On relance les dés.

Je t’ai tout dit. Mes peines, mes joies, mes incompréhensions et mes questions.

Pourtant, pendant tant de mois, tu m’as baladé à travers tes mots, tu m’as assuré que tu étais heureux, que je te rendais heureux.

Même si tu ne voulais pas m’embrasser.

J’ai attendu. J’ai attendu en regardant tes mains, ta bouche. Attendu en retenant mon souffle.

J’ai continué à te faire rire.

Et un jour, comme pour renforcer mes peines, comme pour remettre en question mes joies, comme pour donner une raison d’être à mes incompréhensions et à mes questions, tu n’as plus répondu.

Game over sans que la partie n’ait commencé.

Quel drôle de jeu.

La Belle

La Belle on en parlera pas.

Jeu de merde.

Mes emmerdes

« Tu viens prendre le café ? »

Ma mère m’appelle. Je rejoins la petite famille au salon.

« Alors, le Cab ? »

Je souris. Finalement la voilà ma grande récré !

Avec l’Associé Vampire qui joue les grosses brutes, Collab et Patrick les pions toujours prêts à ramasser les balles pour les grands qui jouent, l’Impératrice de Sabah (NDLR : la rédaction promet un article présentant l’Impératrice comme il se doit) régnant sur les mean girls et les Stagios.

Les Stagios qui se font traiter de minus et dont il parait que la mère est tellement grosse qu’il y a un décalage horaire entre ses deux fesses. Que les enfants sont méchants.

Et au milieu de ça, on joue à quoi?

« Ca va le Cab, ça commence à aller mieux ».

J’aime pas mentir à ma mère.

Mais à quoi bon lui dire que finalement, je laisse le Cab jouer avec ma vie?

5 réflexions sur “Le Jeu

  1. J’adoooooore cet article !! Finalement, l’enfance est en général la meilleure période, on est tellement libres et innocents! Pas le poids du monde sur les épaules, les questions sur le futur,…
    Et c’est vrai qu’avant mon plus grand rêve c’était d’avoir des pouvoirs magiques, alors que maintenant, c’est d’exercer un métier qui me plait (rasoir…)
    PS: Je suis Phoebe 😉

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