Juste un petit moment

Les six mois sont écoulés.

MDFT n’a plus d’objet, mais l’envie d’écrire persiste.

Alors écrire quoi ?

Il me faut juste un petit moment.

Un petit moment pour souffler, reprendre mes esprits.

Un petit moment pour recharger mes batteries et renouveler mes émotions.

Un petit moment pour vivre de nouvelles choses et avoir de nouvelles choses à dire.

Je vous reviens très vite, ressourcée.

Costa, cookie etc(hocolat) 

9 février 2015

« – Je ne pourrais pas survivre autrement, viens m’aider à choisir la couleur de fond !

– Comment tu vas appeler ton premier article ?

La petite robe noire ».

Lancement de MDFT.

Cinq mois plus tard, l’heure du bilan.

J’ai survécu.

C’est pas encore tout à fait fini, il me reste dix jours à tenir au Cab.

Mais ça commence à sentir le départ.

Notamment du fait de son départ.

5 janvier 2015, premier jour de stage

Je suis un peu perdue, j’ai pas encore mes repères.

Je viens de finir la formation informatique et je laisse Minus me guider vers ce qui allait devenir le Carton.

Elle m’a présenté à la troisième cobureau : Costa.

Je me suis sentie rassurée.

Je ne sais pas trop pourquoi.

Tous les regards que javais croisé jusque là m’avaient effrayé et mon pressentiment général était mauvais.

Je ne comprenais pas l’absence de bruit, les portes fermées des bureaux, les esprits fermés des gens dans les bureaux qui n’ont pas eu la curiosité de venir saluer la nouvelle stagiaire.

Costa, elle avait l’air normale.

Elle avait cette petite lueur dans le regard qui m’a permis d’expirer.

21 janvier 2015

Deux semaines à peine se sont écoulées.

Pourtant, avec Costa, on a déjà vécu les coups de Patrick dans le Carton, les crises de larbinat de Collab Viré et le vide intersidéral.

J’ai envie de démissionner, tout quitter. Je suis prête à prendre ce risque.

« Mais comment je vais faire sans toi ? Pars pas ! »

Je ne suis pas partie.

30 mars 2015

Lundi matin.

Je découvre sur ma table le mug offert par Costa pour mon anniversaire sous le regard méprisant de Minus.

On rit, on parle.

Elle me dit qu’elle a passé son week-end à pleurer. Qu’elle ne le supporte plus. Qu’elle a pris sa décision, qu’elle va démissionner.

« Mais comment je vais faire sans toi ? Pars pas ! »

Elle n’est pas partie.

En fait, c’est ça survivre.

Après-demain, Costa aura fini son stage, et je vais me retrouver seule.

J’ai un peu peur.

J’ai survécu car je n’étais pas seule, et que Costa était là pour moi.

J’ai survécu car je n’étais pas seule, et que Costa avait besoin que je sois là pour elle.

Et là, je vais me retrouver seule, et j’ai peur qu’une seule semaine seule ait raison de moi.

Ces six derniers mois, j’ai crains pour mon intégrité intellectuelle, j’ai frémis pour ma carrière, j’ai presque pleuré pour l’humanité.

Mais quand j’y repense, ces six derniers mois, j’ai aussi ri comme une enfant.

Tous les jours.

A l’abri dans mon Carton, j’ai chanté sur des airs de Disney mon désespoir, m’interrompant pour essuyer mes larmes de rire. J’ai pouffé en entendant Costa me conter ses deboirs avec Collab Viré. J’ai colorié les dessins qu’elle me tendait et j’attendais l’heure du goûter.

J’ai retrouvé mes six ans aux détours d’une amitié qui m’a replongé en enfance, parce qu’il le fallait.

Parce que face à l’horreur des grands, on ne pouvait survivre qu’en renouant avec la candeur.

Parce qu’il ne fallait pas céder à leur envie malsaine de voir des larmes le long de nos joues, parce qu’il était jouissif d’observer leur regard interloqué face à nos visages souriants.

Lundi soir

Texto. MMS. Costa.

« Cookies Milka Oréo pour demain, tiens toi prête ! »

Je relis « La petite robe noire« , là où tout a commencé.

Je me dis qu’avec tout le chocolat mangé avec Costa, jai pas gagné en confort dans la robe !

Et pourtant, je me sens quand même plus légère, soulagée de me dire que la profession de demain, c’est aussi Costa.

Je nous imagine prêter serment en portant la perruque de la Reine des Neiges et je ris.

Je ris en réalisant que ces six mois n’auront pas aspiré nos âmes, que s’il est certain que le droit nous passionne, il ne suffit pas à nous définir.

Collab Viré a dit un jour « C’est quoi le bonheur ? Arrête avec tes histoires de bonheur, tout le monde s’en fiche du bonheur ».

Le bonheur ?

Là tout de suite, ça tient en un cookie offert par une future consœur.

On vous a bien eu.

Un Combat Triennal

Haut les mains.

Je pose les armes. Je quitte le front.

Plus la force de combattre.

Combattre contre les humiliations, combattre pour mon honneur.

Pas cette semaine.

Cette semaine, j’ai d’autres choses en tête.

D’autres angoisses à régler. 

Alors, cette semaine, je lâche les armes.

Je me rends.

Allez-y, je suis seule face à vous.

Et d’ailleurs, pourquoi vous fais-je si peur ?

Est-ce ma petite taille qui vous donne envie d’imposer votre grandeur avec tant d’acharnement ? Est-ce ma féminité qui vous inspire ces relents de virilité mal placés ?

Qu’importe, je m’en fiche.

Je ne me bats plus.

Mais alors, si je ne me bats plus, cela veut dire que le combat est fini ?

A la fin d’un combat, il y a un gagnant, non ?

Mince alors…

Je vous observe avec amusement.

Regardant mes armes à terre en vous demandant si vous m’avez vaincu.

Quant à moi, dès l’instant où j’ai posé les armes, j’ai cessé de penser à vous.

J’ai cessé d’avoir peur de vous froisser, d’avoir besoin de me justifier.

J’ai quitté vos murs pour me rendre en d’autres lieux.

Pour y voir d’autres gens.

Pour me réconcilier avec la profession que vous prétendez exercer.

Je ne vous observe plus à présent, avec encore plus d’amusement, avec l’envie irrépressible de vous conter une histoire.

Il était une fois, en juin 2012.

Trois ans.

Trois ans depuis que j’ai passé pour la porte du cabinet de JJ.

Trois ans que je suis tombée amoureuse.

Eperdument amoureuse.

Comment ne pas l’aimer ?

D’abord, il y a eu les rendez-vous.

Je n’oublierai jamais le premier.

J’avais verni mes ongles avec quelque chose de discret. Une couleur pâle, pour faire distinguée.

Dès qu’ils sont entrés dans la pièce, j’ai su que d’une certaine manière, il entrait aussi.

Et j’ai directement senti ce quelque chose naître au fond de moi.

Je savais ce que c’était, mais je refusais de l’admettre. Enfin, au tout début seulement. Car dès que les conversations ont commencé j’ai senti mon coeur s’enflammer. Là, je ne pouvais plus nier.

J’étais fascinée par l’intelligence des échanges, l’écoute qui en ressortait. Comme si par leurs mots, lui et moi nous étions trouvés, sans savoir que l’on se cherchait.

Pourtant, au premier rendez-vous, je n’ai pas dit un mot.

Il y en a eu beaucoup d’autres par la suite.

Les clients n’étaient pas forcément les mêmes, mais ils avaient toujours la délicatesse de l’amener avec eux.

Comment ne pas l’aimer ?

Comment ne pas se laisser envoûter par cette excitation qu’il éveille en moi ?

Lorsque j’y pense, lorsque je le cherche, lorsque j’essaye de le comprendre alors qu’il m’échappe. Comment être insensible à cette rage qu’il éveille en moi, cette envie de l’éluder, de lire entre ses lignes ?

Oserais-je nier ce besoin, parfois incontrôlable, presque malsain, de lui tordre le cou lorsqu’il ne me satisfait pas, pour le soumettre à mes besoins et réussir à lui faire dire ce que je veux entendre ?

Comment ne pas l’aimer ?

Comment ne pas l’aimer alors qu’aucun autre n’arrive à m’interpeller à ce point.

Face à son immensité, je ne suis rien. Je m’incline devant les méandres de ce qu’il est et demeure fascinée face à son aptitude à se renouveler perpétuellement.

Je voudrais qu’il me guide, perpétuellement, à travers le fil de chacune de mes questions.

Lui qui confronte mon esprit si souvent, avec tant d’intensité, réveillant une soif de savoir et une impatience qui toujours me surprennent.

Comment ne pas l’aimer ?

Alors qu’avant je jurais être incapable de défendre un homme que je me pensais incapable de lire derrière un fait, il m’a tendu la main, me guidant à travers la grandeurs de nos libertés fondamentales, les rouages de notre démocratie et la complexité d’un être humain.

Comment ne pas l’aimer ?

Alors qu’il est le seul qui pour exister fait résonner les mots ?

Alors qu’il offre à cette langue que je chéris tant, une tribune où elle et lui se laissent mettre en bouche, s’unissant pour, ensemble, plaire, émouvoir, convaincre. Justement.

Comment ne pas l’aimer ?

Il est mon feu, il est ma rage de vivre.

Il m’a donné envie de sortir du lit tous les matins me portant, avec une énergie indescriptible, vers tous les rêves, les objectifs et les fantasmes qu’il avait à offrir.

J’y ai cru. Je lui ai pris la main. Je l’ai suivi.

Et je n’ai pas été déçue.

J’ai ressenti de la joie souvent, des interrogations tout le temps, de la colère parfois.

J’ai hurlé de bonheur en trouvant certains arguments, je me suis arraché les cheveux à la recherche de certaines jurisprudences, j’ai versé des larmes face à certaines condamnations, esquissé des sourires face à d’autres.

J’ai vécu un amour fou.

Comment ne pas l’aimer ?

Comment ne pas aimer ce droit qui me fait tant vibrer.

Trois ans depuis que j’ai passé pour la porte du cabinet de JJ.

Il parait que l’amour dure trois ans.

Depuis le Cab, je le découvre sous un aspect que je n’avais jamais imaginé.

Il me dégoûte, je ne le reconnais pas.

Lui aussi s’éloigne de moi.

On ne se comprend plus.

Ces dernières temps, j’ai cessé de croire en nous, dépitée de constater que Beigbeder avait raison.

Puis, cette semaine, j’ai arrêté de me battre.

J’ai arrêté de me battre contre vous.

Et c’est dès l’instant où j’ai cessé d’avoir peur de vous froisser, d’avoir besoin de me justifier, à la minute où j’ai quitté vos murs pour me rendre en d’autres lieux, voir d’autres gens, que je me suis souvenue.

De tout. De notre histoire.

Le droit et moi on s’est retrouvés.

Et bordel, qu’est ce qu’on s’aime.

Alors, qui a gagné ?

La couleur des Yeux de ton Frère 

J’ai pas envie de raconter cette histoire.

Depuis le premier jour.

Je savais que j’aurais envie de partager mille choses.

Des souvenirs de classe, mon quotidien qui me dépasse et mes amours échoués qui s’entassent.

Mais pas lui. Pas ça.

Ça, c’est trop frais. Une plaie encore ouverte.

On n’écrit pas sur les plaies encore ouvertes, ça se fait pas, c’est tout.

D’abord, parce que ça revient à remuer la plume dans la plaie, et que par définition, la douleur en est insoutenable.

Ensuite, parce que ça donne nécessairement une histoire mal écrite. Ça bave, ça coule, ça colle. C’est dégoûtant.

Enfin, parce qu’écrire avant que la plaie ne soit refermée, c’est prendre le risque de laisser une cicatrice.

Indélébile.

Oui. J’en suis convaincue. Il y a des choses qui ne s’écrivent pas.

Alors, je n’écrirai pas.

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L’Eos du Verger

Jeudi matin

L’ambiance au Cab est de plus en plus étrange.

Minus et l’Impératrice sont revenues du pays lointain dans lequel elles s’étaient rendues la semaine dernière.

Et depuis, rien n’est comme avant. Jeudi matin, je ne savais pas encore pourquoi.

J’ai de la fièvre aussi. Ça fait plusieurs jours que j’ai de la fièvre. Ou plutôt, plusieurs semaines que j’ai de la fièvre depuis plusieurs jours.

Je ne m’inquiète pas. Je me connais. J’entends le message que m’envoie mon corps. Impuissante, mais je l’entends.

Jeudi midiLire la suite »

Le Décor de Burning Man

Objet : Résiliation du Bail

J’ai la bouche sèche.

Je reprends une gorgée d’Ice Tea et je continue à descendre l’écran à l’aide de ma souris pour m’assurer qu’aucune faute ne se serait glissée dans mon courrier.

Décisif courrier.

« Conformément à l’article blabla de mon contrat de bail, je vous informe par les présentes blablabla, point de départ de mon préavis de trois mois, blabla, bien à vous ».

Pas de faute.

Print.

Je vais à l’imprimante. Je croise Patrick.

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L’Intemporel Quai de Gare

J’ai abandonné.

Au Cab.

Plus d’effort.

Je pense que la plus grande preuve de cet abandon s’est manifesté lorsque lundi, j’ai décidé d’enfiler un pantalon qui ne soit pas de costume pour aller « travailler ».

Mais c’est plus fort que moi.

Les mots de Collab Viré résonnent dans ma tête. Je me dis qu’à ce stade, la situation ne peut plus empirer, et que de toutes les manières, avec ces gens, on ne pourra jamais se comprendre.

Alors à quoi bon ?

À l’aise dans mon pantalon, je me rends dans le Carton.

Ça va être une belle journée.

Il fait beau, et j’ai un déj de prévu avec une Intemporelle.Lire la suite »

Le Fabuleux Destin de Mademoiselle Minus

J’ai aussi du mal à parler d’elle.

Pour les mêmes raisons que l’Impératrice.

Beaucoup trop de choses m’échappent, alors j’ai du mal à prendre la plume.

Pourtant, elle est face à moi tous les jours.

C’est la première personne que j’ai rencontré au Cab.

Mon premier jour.

Je me revois passer le pas de la porte, demander la RH en arrivant à l’accueil.

On m’a fait patienter dans le hall.

Je revenais de loin. De très loin

J’avais l’esprit ailleurs. Plus rien de tout ça ne comptait.

Pourtant, je m’étais jurée de leur laisser une chance.

J’avais mis mon haut des premiers jours. Celui avec un col Claudine blanc. Et même une veste de costume.

J’ai attendu. Longtemps.

La femme de l’accueil a fini par revenir vers moi.

« La RH ne peut pas vous accueillir. Mais vous avez une formation ce matin. En salle 8. Allez y. »

C’est peut être à ce moment que j’aurais du partir.

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Voyage le long du Fil

Mardi matin

À peine arrivés, les beaux jours sont déjà repartis.

Comme si le ciel non plus ne savait pas trop où il en était.

Dans le Carton, à l’abri du froid et de la pluie, j’allume mon ordinateur, ouvre une page internet et appuie machinalement sur le touche « f » du clavier pour être redirigée vers le site qui va rythmer ma journée.

C’est les vacances.

Les gens publient leurs photos de voyage.

Voyage.

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Mon Empire contre ses Dragibus

Il est temps pour moi de vous présenter celle dont j’ose à peine prononcer le surnom.

L’Impératrice de Saba.

Le seul personnage du Cab dont il est difficile de parler tant sa complexité me laisse perplexe.

Ma difficulté à la cerner vient surtout de ma difficulté à appréhender tout son pouvoir.

Pas sûre d’avoir compris les règles.

Pourtant, c’est important les règles, pour survivre.

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